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mercredi 26 février 2020

France2022 : Economie décarbonée ?




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En préambule : panorama énergétique (vidéo de 110 minutes)

Jean-Marc Jancovici : HEC Débats - 05/02/2020


et "Décarboner l'économie, c'est un projet extrêmement noble", interview de Jean-Marc Jancovici par Nikos Aliagas le 27 novembre 2018 sur Europe 1.

Les lecteurs qui souhaitent aller encore plus loin pourront prendre aussi connaissance du contrepoint développé par Marc Dugois dans sa lettre ouverte à Jean-Marc Jancovici en date du 25 février 2020.



Economie décarbonée ... Qu'est-ce à dire ?

1. De prime abord, c'est un non sens ! Faudrait-il donc faire l'impasse sur la chimie organique ? Oublier le rôle du carbone sur Terre et dans les processus du vivant ? Prétendre trouver un substitut au carbone ?

2. Chacun comprend qu'il ne s'agit pas de se passer du carbone mais d'essayer de sortir de l'âge du brut, de l'or noir et aussi des composés carbonés issus des entrailles de la Terre : gaz et charbon. De voir comment faire autrement, sans lui. Sans eux.

3. Déjà s'émerveiller de la mise en réserve sur laquelle vit l'humanité depuis deux bonnes centaines d'années. Qui a bien pu prévoir et ordonner l'épargne gigantesque, la mise en réserve des énergies fossiles alors que dame Nature nous montre si souvent ses extraordinaires facultés de recyclage en continu : rien ne stagne vraiment, toute chose est réutilisée au bénéfice de l'une ou l'autre forme de vie, au gré des saisons ?

4. Nous le savons aujourd'hui : le pétrole - l'huile de pierre -, le charbon et le gaz résultent d'un processus biochimique. Comment se fait-il que la Vie, entendue comme une entité sans transcendance, ait pris soin de mettre de côté de tels gisements pour le plaisir des hommes et les nécessités de la vie humaine ? C'est tout à fait curieux quand on prend la peine de se pencher quelques instants sur ce mystère d'économie. Encore plus étrange quand s'étendent sous nos yeux les ravages d'une marée noire : le produit qui sort des flancs du navire en perdition n'est visiblement pas fait pour se déverser dans la nature tel quel. Il faut donc que non seulement ait été prévue une fabrication sans usage immédiat par quelques formes naturelles mais qu'en plus le stockage de cette production "biologique" ait été organisée de telle sorte qu'elle ne mette pas en péril des formes de vie (plantes et animaux) ne supportant pas sa présence. Il faut de surcroît que son utilité ait été anticipée car, là encore, nous ne voyons guère dans la nature, sauf à la méconnaître, de processus qui ne soit, au bout du compte, sans intérêt. Pendant des siècles et même des millions d'années, la Terre préparait en des lieux clos et protégés de quoi satisfaire une humanité vorace en énergie mais encore incapable de mettre à son service les réserves constituées puisqu'il lui faudrait d'abord accumuler un grand nombre d'inventions, imaginer et construire des machines avant d'en tirer profit. 

5. Avant de vouloir sortir sans tarder de l'ère carbonée, prenons le temps de méditer sur cette histoire fantastique où s'entremêlent le génie inventif des hommes et l'ingéniosité patiente, de très long terme, formidablement anticipatrice de notre environnement. Il y a là de quoi, oui s'émerveiller, et, naturellement, de s'inspirer pour les âges futurs !

6. Avant de cracher sur "le grand capital", le capitalisme ou les temps modernes, pensons à cette donnée capitalistique de premier ordre, cette donnée sans laquelle, nous n'aurions pu accomplir des prouesses (et générer de nombreux dégâts) : le capital des ressources gratuites mis à notre disposition par une très longue période de préparation. Sans lui, nous ne pourrions pas agir à notre guise pour satisfaire les besoins élémentaires et bien d'autres de notre existence terrestre.

7. Si maintes économies libérales ou dirigistes sont encore aujourd'hui d'essence capitalistes, n'allons pas trop vite en déduire que des volontés malfaisantes et ne songeant qu'à exploiter l'homme par l'homme, ne jurant que par l'aliénation ... auraient fait main basse sur les affaires du monde. Cette essence capitaliste découle logiquement d'un alignement des travaux humains sur les réserves fossiles : à cet immense réservoir répond une organisation où la prédation joue un rôle majeur. Chacun essaie de s'emparer, à bon compte, des trésors recelés en ses flancs par notre planète. Et pour ce faire, de gigantesques conglomérats, compagnies, multinationales, ... se sont constitués. Il suffit de songer à la logistique nécessaire pour extraire les réserves fossiles puis pour en tirer partie (raffineries, transports, distributions). Je comprends qu'elle engendre en cascade la formation de groupes très puissants qui auront tendance à essayer de faire la pluie et le beau temps.

8. Sortir de l'ère des réserves fossiles ouvre donc des possibilités nouvelles d'organisation qui ne seront pas seulement des correctifs apportés à des systèmes critiquables mais des formes rendues nécessaires par la mise en oeuvre de ressources non carbonées. C'est important de le souligner pour éviter d'entrer ans de vaines querelles où la dénonciation, la critique, l'accusation ... finissent par envenimer les débats, obscurcir l'avenir et retarder les efforts urgents. Diaboliser les acteurs actuels comporte le risque de provoquer des crispations, des résistances et des attitudes contre-productives. Les enjeux du moment sont tels que nous aurons besoin non pas de diviser, d'ostraciser ou de désigner à la vindicte populaire mais de rassembler toutes les bonnes volontés. Il en va de l'intérêt de tout un chacun.

9. Nous pourrions ici faire un parallèle avec une autre nécessité de plus en plus prégnante : réduire la consommation per capita de protéines animales.  Le faire en adoptant des attitudes de tribunal improvisé et en désignant des coupables engendre des tensions néfastes : au lieu d'obtenir la coopération, l'entraide et des conséquences positives, on ne fait que renforcer les crispations et compliquer la transition vers des modes alimentaires plus conformes aux intérêts du plus grand nombre. Là encore, au lieu de vouloir intenter des procès déplacés et malvenus, il convient de repenser le sujet (en l'occurrence l'alimentation humaine) à frais nouveaux : quelles données contemporaines et futures incitent à revoir nos façons de nourrir nos faims ? Par exemple : dans les zones très froides (pôles), l'alimentation humaine est très majoritairement à base de protéines animales grasses et modifier ce régime (plus de sucres notamment) a des répercussions négatives sur la santé des peuples de ces zones froides. Le réchauffement manifeste de l'atmosphère terrestre ne serait-il pas l'un des facteurs justifiant que l'alimentation humaine s'oriente davantage vers les protéines d'origine végétales ? N'y aurait-il pas là une nouvelle occasion de s'émerveiller : les populations humaines étant en forte croissance, la température s'élevant, ... les nécessités vitales du corps humain paraissent avoir été ordonnées (dès l'origine) de telle sorte qu'au lieu de s'affoler, nous puissions comprendre que tout concourt au bien d'une humanité pleinement consciente de l'extraordinaire organisation du vivant ?

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