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mercredi 8 avril 2015

Politique, un dur métier pour qui l'accomplit dans un esprit de service




Anne Hidalgo



Les Français, comme d'autres peuples, ont les politiques qu'ils méritent. Ils ont les hommes et les femmes politiques qu'ils ont choisis parmi une multitude de candidats, les uns soutenus par un parti et d'autres qui se sont affranchis d'une quelconque tutelle.

Se défausser de sa responsabilité de citoyen en pariant sur l'abstention ou en usant de l'argument des "promesses non tenues" ne trompe personne : nous sommes collectivement responsables de ce qu'il advient de notre pays. L'indigence de certains politiques ne suffit pas à expliquer les très grandes menaces qui pèsent aujourd'hui sur l'avenir de la France. Chacun de nous peut, à son échelle, contribuer à éviter un désastre.

Certes, nous confions nos intérêts à des personnes faillibles. Exposé à toutes sortes de tentations, le personnel politique risque à tout moment de faillir à ses missions. Exposé médiatiquement, il subit la pression grandissante des pouvoirs qui lui contestent sa place. Cette pression est de plus en plus forte aujourd'hui puisqu'un vent violent souffle contre toute position dominante, toute autorité, tout représentant d'un ordre aussi légitime soit-il. 

Du point de vue étroit où chacun de nous se place, certaines options politiques peuvent nous paraître médiocres et même nuisibles tandis que d'autres les qualifient d'excellentes. Sommes-nous toujours en mesure de juger ? Sur quelles données nous appuyons-nous pour apprécier telle décision, telle loi, telle disposition ? Sommes-nous sûrs d'être assez compétents pour discerner les causes, les possibles et les conséquences ? Vastes questions que tout citoyen raisonnable n'élude pas afin de ne pas s'emporter à tort. Et d'ailleurs, à quoi bon vitupérer contre tel ou tel pouvoir ? A quoi bon accuser l'un ou l'autre d'avoir failli ? Qui de nous ne s'est jamais trompé, n'a jamais fauté ?

Il est probable que tout parti au pouvoir qui se donnerait la peine de présenter un bilan honnête et non mensonger de l'action du gouvernement qu'il aurait soutenu emporterait assez aisément de nouvelles élections contre un parti d'opposition qui ne saurait rien faire d'autre que d'émettre des critiques sans présenter un projet solide et bien ajusté aux nécessités du temps présent. 

Toute l'énergie dépensée à maudire l'action d'un autre est perdue pour bâtir une réponse digne d'intérêt. Céder à l'air du temps qui prône la critique virulente, la calomnie ou la médisance, la caricature grotesque ou la dérision c'est perdre beaucoup de temps et passer à côté de propositions constructives d'autant qu'il devient de plus en plus délicat de remédier aux dysfonctionnements d'une société qui ne cesse de gagner en complexité. 





En ayant le souci de nous simplifier, de nous unifier et de nous "cultiver en complexité" comme nous y invite Gérard Gigand (voir aussi l'enregistrement "la compréhension trialectique comme géométrie de la systémique"), nous deviendrons capables de choisir des élus dont nous serons fiers et que nous aurons à coeur de soutenir dans l'exercice d'un métier pour le moins difficile quand celui qui est en charge des intérêts collectifs accomplit ses missions dans un véritable esprit de service et avec beaucoup d'humilité.

Le nombre de candidats aux élections fait parfois illusion. Il semble que beaucoup se pressent encore pour obtenir des sièges en or mais si nous laissons s'installer une pression grandissante sur nos élus, il y a fort à parier que le nombre de vocations ne cessera pas de décroître. Pire : il n'est pas certain que ceux qui braveront encore le suffrage populaire soient les hommes et les femmes dont l'espace public et le bien commun aient le plus à gagner. 

L'élection présidentielle en France concentre à elle seule de tels enjeux de pouvoir qu'au lieu d'élire des personnes vraiment aptes à présider aux destinées de la France, nous n'élisons bien souvent qu'un chef de parti qui a su défendre habilement sa place contre ses principaux rivaux et s'imposer en face d'autres chefs de parti. Cela ne donne pas hélas les qualités essentielles permettant de veiller au bien commun d'une nation.

Le projet France2022 prévoit de modifier les pouvoirs du Chef de l'Etat, des Ministres et des représentants de la nation afin que la France sorte des impasses actuelles et développe un potentiel malheureusement laissé en jachère par des pouvoirs exécutifs et législatif devenus impuissants dans un monde qui a profondément changé depuis 1958. Des pouvoirs nationaux qui, faute de courage, laissent les élus locaux gérer des situations de plus en plus inextricables.

L'une des grandes évolutions défendue par le projet France2022 consiste à donner aux maires (de municipalités plus étendues et moins nombreuses) des pouvoirs plus larges sur la conduite des affaires de la nation tout entière, non plus confondue avec un Etat stérile comme aujourd'hui dans de nombreux domaines mais subdivisée en cinq provinces ayant chacune une forte autonomie de gouvernement. 

Grosso modo mais à bien préciser, cela revient à faire de la France une fédération de cinq Etats. Le niveau national joue alors beaucoup mieux son rôle : il ne s'occupe pas de gouverner en détail mais tient lieu d'articulation aujourd'hui manquante entre le niveau de gouvernement européen et le niveau de gouvernement étatique (requalifié en gouvernement provincial). Gouvernement étatique qui englobe tous les domaines non régaliens, laissant au niveau national le soin d'organiser les pouvoirs régaliens en étroite concertation avec ses voisins, l'Europe tout entière et le reste du monde, soit déjà fort à faire ! 

Dans cette nouvelle organisation, chaque pouvoir provincial a les coudées franches pour organiser et mettre en oeuvre les pouvoirs non régaliens en tenant compte des réalités de terrain qui ne sont pas les mêmes partout et, plus encore, en respectant davantage les prérogatives des élus locaux et donc le principe fondamental de la subsidiarité défendu par le projet France2022.

mardi 7 avril 2015

Le travail humain

"Il faudrait pouvoir réinvestir le travail 
comme un problème politique. 
Les politiques ne parlent que d’emploi. 
Or la priorité est l’organisation du travail."



"Que pour chacun, son propre travail 
soit un objet de contemplation."










Le travail humain, vaste domaine dont le traitement par un projet présidentiel réclame beaucoup d'attentions : la réussite dans ce domaine conditionne une bonne partie de l'avenir de la nation. Les slogans, les incantations, la démagogie ou la faiblesse de l'analyse ne font qu'aggraver les problèmes. 

Ajout du 23 mai 2016 : ... et nous sommes aussi témoins en France et ailleurs de l'ineptie d'un traitement de ces questions en fin de mandat présidentiel, sans avoir pris le temps nécessaire en amont et en aval pour conduire une politique digne de ce nom en matière de travail. 

Il semble au contraire que le gouvernement actuel (période de 2012 à 2017) prétende réformer le travail d'une nation en bâclant le sien, non que les bonnes volontés à l'oeuvre manquent de courage, d'intelligence et d'ambition mais parce qu'elles se retrouvent prisonnières d'un espace-temps très insuffisant pour faire avancer un chantier beaucoup trop tardif dans une mandature présidentielle qui s'est d'abord préoccupée de l'accessoire pour en venir à l'essentiel quand il est déjà bien tard, manifestant ainsi le manque de recul (le fameux chapeau bleu de la méthode d'Edward de Bono) d'une classe politique orientée vers le paraître et non vers l'être, et bien pire : entretenant des mensonges permanents sur ses préoccupations. Au lieu de penser et d'agir pour améliorer la condition sociale du plus grand nombre, cette classe-là roule pour son propre compte et pour les intérêts de quelques copains au risque de provoquer un tsunami économique. L'heure est si grave aujourd'hui qu'il est fort à craindre que se déroulent des événements dramatiques au coeur même d'une France déboussolée par l'arrogance de politiques qui ont perdu de vue l'essentiel.

Voici, en ordre dispersé, les constats (le chapeau blanc d'Edward de Bono) sur lesquels se fondent l'analyse et les propositions du projet France 2022 au sujet du travail, de l'emploi et des rémunérations : 

 1. taux de chômage élevé 
     depuis de nombreuses années en France ; 

 2. entrée des jeunes 
     trop tardive sur le marché de l'emploi 
     après des années de formation 
     coupées des nécessités matérielles
     et un temps de réflexion tellement négligé
     qu'il laisse une place démesurée
     à nombre d'orientations par défaut
     ou sans issue viable ; 

 3. sortie trop précoce des seniors 
     (mais pas de tous) ; 

 4. inégalités de salaire proprement injustes et même indécentes ; 

 5. instabilité des emplois ; 

 6. distribution inadéquate 
     des emplois publics ; 

 7. répartition géographique des emplois
     déséquilibrée ;

 8. inadéquation des offres 
     et des demandes d'emplois ; 

 9. déconsidération et perte du sens du travail humain ; 

10. travailleurs lassés de la course
      au profit financier à court terme
      et qui demandent que l'on en revienne
      à la quête de sens dans le travail :
      tel produit, tel service, pour qui ? pour quoi ? ;

11. organisations du travail
      broyant l'homme et la femme
      et le corps de la famille,
      non plus seulement physiquement
      mais nerveusement et moralement
      voire les épuisant (burn out) ;

12.  orientations mercantiles des travaux,
       et parfois même criminelles (IVG)
       incitant le personnel à effectuer des actions
       qu'il réprouve intérieurement ;

13. défaut de coopération professionnelle
      au profit d'une concurrence acharnée,
      déloyale voire suicidaire ou criminelle ;

14. interactions homme-machine ou automate
      mal pensées et principalement orientées
      vers des augmentations de cadence
      au détriment de la qualité des résultats 
      et même de la productivité réelle
      et bien évidemment de la santé des personnes ;

15. contrats d'objectifs insensés
      sans que soient intelligemment évalués
      puis mis à disposition
      les moyens nécessaires pour les atteindre ;

16. prédation généralisée des grandes structures
      à l'égard des plus petites
      sans la moindre considération
      pour les trésors de savoir-faire
      qu'elles ont patiemment élaborés 
      et/ou dont elles sont dépositaires ;

17. raisonnements des instances dirigeantes
      en très grande masse (de préférence financière)
      qui ne tiennent aucun compte
      des personnes et des territoires
      impactés par les conséquences
      des décisions prises
      (délocalisations intempestives ...) 
      ni même d'ailleurs de la pérennité
      des structures et des compétences ;

18. dévalorisation dramatique 
    des métiers concrets ; ...



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comme le rappelle Pierre Rabhi dans "Convergence des consciences" au chapitre de "La main" ...

mais ... lueurs d'espoir illustrées par les récits de Laurence Decréau, qui, dans son livre : "L'élégance de la clef de 12", relate l'histoire singulière de plusieurs "cols-blancs" qui ont découvert avec bonheur la voie d'un accomplissement par un travail en prise avec la matière. (Ajout du 3 juin 2016) 

Si le chômage ne résultait que des seuls progrès de la mécanisation et de l'automatisation des travaux de telle sorte que l'on pourrait dire : "Les machines étant plus performantes que l'homme dans de nombreux domaines, nous produisons au XXIème siècle de grandes quantités de biens et de services sans qu'il faille recourir à une main d'oeuvre abondante", nous aurions simplement, du moins en apparence, à répartir la propriété de l'outil de travail et les fruits produits. Nous constatons cependant que, dans le domaine des services à la personne en France, nous manquons de bras et que dans tous les pays, y compris chez nous, de nombreuses personnes vivent dans la misère ou la précarité tandis que ceux qui ont encore les moyens de subvenir à leurs besoins ont massivement recours à des produits qui pourraient être élaborés en France mais qui proviennent de terres lointaines où s'activent des populations sous contraintes, exploitées, sacrifiées sur l'autel d'un consumérisme aveugle et sourd à la détresse de millions d'hommes et de femmes, réduits à l'état de rouages d'une machine économique mondiale qui engendre de multiples esclaves, qu'ils soient producteurs ou consommateurs : au lieu de travailler à la libération de l'être humain et au service de la personne humaine, elle semble tournée vers l'accroissement de la dépendance comme si ce qui était gagné d'un côté : diminution de l'effort physique, suppression de gestes répétitifs, gains de précision, ... devait être payé de l'autre par de nouveaux asservissements de telle sorte que l'on aboutit à un bilan mitigé : quelques-uns profitent des gains actuels jusqu'à l'indécence, tandis qu'une multitude présente (et future) engrange(ra) des pertes colossales (si nous poursuivons aux rythmes infernaux de l'époque contemporaine).

Une première réponse consiste à indexer la part dédiée aux services à la personne sur les revenus des autres activités : un pourcentage des richesses produites est affecté aux dépenses de santé, d'éducation, de sécurité .... C'est ce que nous faisons aujourd'hui en France avec quelques succès mais en rencontrant aussi des difficultés connues de tous : le revenu des autres activités tend à stagner et la production nationale ne suffit plus, ni directement (production locale) ni indirectement (exportations) par échanges commerciaux, à couvrir les besoins de la population.

Une autre réponse, celle que préconise le projet France 2022, consiste à sortir partiellement de l'équation économique par une double considération à l'allure paradoxale : "Tout travail mérite salaire" / "De nombreux services à la personne font appel au don gratuit de son temps, de sa personne et parfois même de sa vie" (comme en témoigne le 7 avril 2010 l'explosion dans une usine de Gennevilliers). C'est un premier éclairage à développer et à compléter. 

"Autre réponse" ne signifie pas qu'il faille abandonner totalement l'indexation mais que cette dernière ne peut répondre à la totalité des besoins. En sortant de l'indexation totale, on dissout - encore faut-il préciser comment - l'obsession de la croissance : il n'est pas vrai que notre seule planche de salut soit l'obtention d'une croissance plus forte même si, hélas, les montants de nos dettes publiques ou privées et la quasi impossibilité de les résorber rapidement par une relance de l'inflation semblent commander d'accomplir le maximum pour que notre croissance soit élevée. Sommes-nous prêts en France à obtenir une augmentation du taux de croissance à l'image du Royaume-Uni sous la houlette de David Cameron ou de l'Allemagne sous la férule d'Angela Merkel ? C'est-à-dire au prix de mesures drastiques ? Existe-t-il d'autres voies, d'autres possibilités pour relancer une croissance en berne ? Sujet complexe et sensible qui pose de nombreuses questions, non seulement économiques mais encore sociales, culturelles, ... Sujet de débats houleux entre des acteurs aux intérêts parfois très divergents. Sujet épineux en raison aussi d'erreurs de perspectives dues à l'utilisation d'un quotient directeur à revoir au sein de l'Europe. Voir notamment : "La véritable dette de la France".


Notons au passage que les difficultés de trésorerie de la nation française ont conduit certains analystes à proposer une sortie de crise par une taxation raisonnable du patrimoine avec suppression de l'ISF afin de contrer et de réduire les positions de rente qui sont un frein au développement des activités économiques (produisant des biens nouveaux) et à l'accroissement des revenus du travail. Cf. à ce propos un livre publié en 2014 : "L'horreur fiscale" d'Irène Inchauspé et Sylvie Hattemer.

Avant de développer le point précédent, nous préférons élargir le champ d'investigation afin de donner une vue plus complète de ce qui est envisagé dans le projet France 2022. Pour les développements ultérieurs voir la tribune : "Création d'une monnaie de service et d'abondance".

La réduction des inégalités de rémunération nous paraît être un point central à ne jamais négliger quoiqu'il puisse en coûter à ceux qui estiment qu'ils perçoivent aujourd'hui le minimum auquel ils sont en droit de prétendre, eu égard aux sacrifices divers qu'ils ont consentis ou consentent encore, en raison de leur valeur exceptionnelle, au motif qu'ils assument des responsabilités de haut vol, ... Nous contestons cette façon de voir car tout travail humain, quelles que soient les qualifications requises pour son exercice, comporte une part d'impondérable qui n'a pas de prix. Même le travail le plus humble a une valeur inestimable. 

Ceux qui défendent des rémunérations exceptionnelles ne manquent pas d'arguments pour justifier leur statut hors du commun. Les examiner un à un montre qu'il n'en est pas un qui résiste à un angle d'attaque bien choisi. 

Prenons par exemple le cas des sportifs de très haut niveau dont la cote atteint des sommets. L'excellence de leurs prestations, leur aura, la brièveté de leur carrière, les risques physiques qu'ils prennent, leur entraînement surhumain, leurs qualités admirables ... semblent donner raison à tous ceux qui sont prêts à leur accorder des monceaux d'or. (Voir à ce sujet le chapitre "Football, la démesure" du livre "La convergence des consciences" de Pierre Rabhi).

Nous pensons au contraire qu'il y a là une dérive à remettre en cause. François Jauffret, comparant la situation actuelle à celle qu'il a connue quand il était au plus haut niveau tennistique, rappelle que son salaire d'ingénieur commercial était supérieur à ses gains de jeu et que ces derniers furent environ mille fois inférieurs à ceux des plus grands champions de nos jours. Les données ont certes  changé : multiplication des compétitions, nécessité pour un joueur de s'entourer d'une équipe pluridisciplinaire de haut niveau, obligation de s'entraîner de façon très intensive et permanente, médiatisation mondiale des rencontres, ... Cela ne nous paraît pas justifier un tel écart de rémunération à trois ou quatre décennies d'intervalle. Concernant l'exemple du tennis, il est clair que le changement ne résultera pas d'une décision unilatérale d'un pays isolé. 

Pour d'excellentes raisons éthiques, la France et l'Europe avec elle, s'honoreraient de mettre les pieds dans le plat. Pourquoi ne pas proposer que dans les grandes compétitions, les gains soient moins élevés et plus équitablement répartis entre ceux qui atteignent les quarts de finale voire les huitièmes de finale ? Pourquoi ne pas tenter d'obtenir que, désormais, les cinq premiers athlètes arrivés en tête lors d'un événement sportif montent sur un podium à cinq marches ? Cela ne ternirait nullement l'éclat du vainqueur et cela aurait finalement beaucoup plus d'allure. Cette nouvelle donne aurait l'avantage supplémentaire de récompenser ceux qui, malgré un entraînement sérieux, honnête et méritoire, n'ont pas réussi à atteindre le sommet mais l'ont néanmoins approché de près. Une façon d'encourager les sportifs qui refusent d'avoir recours à des pratiques dangereuses et illicites, dont le dopage ou pire encore, ... d'encourager ces sportifs à persévérer sur un chemin où les seuls alliés de l'athlète sont la très haute technicité et les sciences, la vertu, le courage, la patience, l'amitié et la spiritualité.

Nous ne sommes pas assez naïfs pour croire que ce qui précède résoudra tous les problèmes : pour certains sportifs, seule compte la première place - "si tu es deuxième, tu n'es rien" - et la multiplication des récompenses, comme dans le Tour de France (meilleur grimpeur, classement par points) n'endigue pas la tentation de se doper.

Notons enfin que la brièveté de toute carrière sportive de très haut niveau en tant que compétiteur (sauf rares exceptions) ne justifie plus aujourd'hui que soit attribués des montants de rémunération exorbitants car le développement de l'univers sportif a été si prodigieux à l'échelle mondiale qu'il permet désormais aux sportifs d'emprunter des chemins de reconversion très lucratifs.

Deux sujets viennent d'être abordés : la question du don de soi et le problème des inégalités criantes de rémunération. Ces deux points appellent d'amples développements que nous reportons pour augmenter l'angle de vue.

Nombreux sont aujourd'hui les travailleurs menacés par les progrès de l'automatisation mais aussi par la concurrence des pays où les facteurs de production, tels les salaires, sont nettement moins élevés qu'en France. Le fait que cette concurrence soit provisoire en raison de l'élévation progressive du niveau de vie dans ces pays ne doit pas nous endormir : une fois qu'une activité a été délocalisée, elle entraîne avec elle des travaux en amont - dont le secteur vital de la recherche par exemple - et des travaux en aval. 

Une fois qu'une filière a quitté un territoire, il est illusoire d'y espérer son retour même s'il est vrai que l'on observe parfois des mouvements contraires, soit en l'état soit après des mutations technologiques, soit encore à la faveur d'une redéfinition des objectifs commerciaux (l'histoire de l'horlogerie suisse est une bonne illustration de ce genre de phénomène) ; même s'il est exact que certaines délocalisations n'entraînent pas nécessairement le départ de tout l'amont (la conception et le marketing par exemple) et de tout l'aval (la distribution par exemple). 

Les délocalisations nous privent d'emplois et ont un autre inconvénient majeur que nous devons garder à l'esprit : en resserrant l'éventail des métiers courants sur notre territoire, en diminuant le nombre d'acteurs économiques, elles provoquent par répercussion la fragilisation des entreprises. Nous savons qu'un nombre significatif de faillites est dû aux défaillances de paiement imprévisibles de clients. Ce phénomène est mécaniquement accentué par la diminution des agents économiques : quand votre activité intéresse moins de clients potentiels dans le tissu inter-entreprises (le B to B), la défaillance d'un seul client peut entraîner votre perte. Si nous ne résistons pas, les générations à venir seront privées d'une large part d'autonomie et de liberté. 

Une réponse immédiate risque de fuser : "Cette résistance est à intégrer à notre stratégie économique. Quel rapport a-t-elle avec une interrogation sur le travail humain ?". Le projet France2022 part du principe que des considérations économiques seules (compétitivité, viabilité, pérennité, ...), stratégiques pures (sécurité, liberté, ... ) ou même géopolitiques (alliances manufacturières et complémentarités européennes par exemple) ne suffisent pas à établir le choix des branches à réduire ou à maintenir sur le territoire de la France : une approche éthique et philosophique éclaire l'intelligence et la volonté des décideurs sur tous les chemins étroits où l'erreur risque d'être fatale. 

En ce qui concerne l'avenir du travail en France, nous sommes bien sur une ligne de crête. Nous pourrions nous demander : "Pourquoi avons-nous laissé les délocalisations à grande échelle se produire ? Est-ce seulement pour des raisons de coût ?". Certainement pas. Nous avons, à tort ou à raison, estimé que certains métiers méritaient moins que d'autres notre considération. Nous avons, de manière plus ou moins explicite, de façon plus ou moins consciente, accordé une supériorité aux activités en apparence non répétitives et à dominantes abstraites. Nous avons établi une hiérarchie entre les métiers et nous avons choisi de retenir ce qui nous a semblé occuper le haut du panier. 

En considérant le travail, non plus seulement de l'extérieur, dans ses manifestations sensibles, mais en tenant compte de sa valeur intégrale, nous sommes capables de renverser cette hiérarchie et d'aborder le problème du chômage, les sujets de l'éducation et de l'orientation, avec un oeil neuf.

D'une manière générale, le regard que nous portons globalement sur le travail mérite réflexion. Nous avons aussi à tenir compte des aspects sociologiques, notamment de l'évolution du travail des hommes et des femmes.

L'époque contemporaine en ce début de XXIème siècle est encore prisonnière de conceptions très anciennes. L'une d'elles fait du travail une punition ou même un châtiment. Le réflexe de tous ceux qui sont profondément influencés par cette conception est naturel et compréhensible : éviter de toutes ses forces d'être comptés parmi les galériens ; considérer ces pauvres bougres de haut et s'essayer à toutes les combines permettant de ne pas leur ressembler, combines que l'imagination fertile de l'homme ne cesse d'inventer. 



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Devenir dealer, marchand de drogues illégales, ce n'est pas seulement vouloir gagner beaucoup en peu de temps, c'est aussi penser pouvoir échapper à la condition prétendument misérable de ceux qui exercent un métier au grand jour et qui sont payés au lance pierre.

En ajoutant à ce qui précède d'autres considérations qui établissent une hiérarchie parmi les galériens, nous aurons un tableau plus noir et plus complet d'une situation dans laquelle le travail humain semble avoir totalement perdu et sa dignité et ses fonctions essentielles pour revêtir les oripeaux les plus laids et les plus repoussants. Par exemple, choisir un métier pour parader socialement, se servir au lieu de servir, s'enrichir au détriment d'autrui, tromper ou abuser plutôt que faire grandir ou éclairer l'autre ...

Quels sont les projets présidentiels pour 2017 qui oseront dépasser les clivages superficiels et les vaines querelles politiciennes pour redonner au travail humain ses lettres de noblesse ? Pour affirmer que la privation d'un travail digne est la source de maux très graves et très profonds, de ceux qu'une analyse hâtive ne parvient pas à recenser ? Celui qui est protégé par une indemnité alors qu'il est au chômage est certes mis à l'abri d'une misère extrême mais il est privé d'une pierre de fondation et reste menacé de ruine. Les demeures les plus solides ne résistent pas aux séismes dont les répliques se prolongent. Notre maison France, elle-même, n'est pas à l'abri de secousses dévastatrices.

Au risque de rester encore un moment sur sa faim quant aux prolongements à donner à chaque point évoqué jusqu'ici, nous ne pouvons pas laisser de côté une autre question tout à fait cruciale : les inégalités très grandes des parcours professionnels qui donnent aux uns d'avoir la possibilité de rester en activité quasiment jusqu'à leur dernier souffle et aux autres de quitter le monde du travail par une porte dérobée ouvrant sur un espace fantomatique. Ce que nous avons déjà évoqué plus haut pour les sportifs les plus en vue ou les plus malins.

On aura beau dire que c'est à chacun de se prendre en main, on aura beau invoquer mille autres raisons pertinentes, la cruauté de certaines destinées a de quoi alimenter la réflexion de tous ceux qui estiment préférable de ne pas se résigner à cette casse absurde et qui partagent le souci urgent d'offrir au plus grand nombre la joie de porter des fruits savoureux jusque dans leur extrême vieillesse : fruits d'une insondable diversité puisqu'ils vont de la connaissance de plus en plus fine de soi, des autres et du monde jusqu'au service le plus parfait de l'être le plus imparfait, jusqu'à la résolution des situations en apparence les plus désespérées à vue humaine ; ils s'étendent aussi du service le plus humble et en apparence le plus banal jusqu'à la production de chefs d'oeuvre où se combinent dextérité manuelle et intellectuelle, sentiment artistique et sensibilité à fleur de peau.

L'idéal serait que chaque citoyen puisse reprendre à son compte, sans aucune espèce d'amertume, de fierté ou de férocité, ce mot d'Antoine Bernheim : "Je suis comme une cuisinière qui a été renvoyée mais le plus curieux, c'est qu'à 86 ans, j'ai encore cinq ou six offres d'emploi". (cf. "Antoine Bernheim, le parrain du capitalisme français" de Pierre Gasquet).

Pour aller plus loin, voir et entendre aussi : André Gorz
et Christophe Dejours : "J'ai très mal au travail (1/12)" (vidéo de moins de 10  minutes).

L'objection de conscience municipale ou provinciale


Les lois nationales s'appliquent sur tout le territoire comme en 2015. Une municipalité comme une province a cependant la possibilité désormais, sur des questions de vie et de mort, de faire valoir un droit d'objection de conscience. 

Les conditions précises de l'exercice de ce droit restent à préciser. Au stade actuel du développement du projet France2022, voici ce que l'on peut dire : des questions d'une extrême gravité traversent aujourd'hui les sociétés démocratiques. Certains croient qu'il est toujours possible de les résoudre par une nouvelle législation adoptée à une voix de majorité au Parlement national. Le projet France2022 s'inscrit en faux contre cette croyance.

La première objection conteste le bien fondé de décisions graves - la dépénalisation de l'avortement par exemple, le suicide assisté, ... - reposant sur une poignée de voix de parlementaires au-delà de la majorité requise. Que quelques personnes, aussi honnêtes soient-elles, aussi sincères soient-elles, puissent décider, sans que le peuple tout entier soit consulté, que des millions d'innocents (ou de coupables) mourront sans que rien de simplement humain n'ait été mis en oeuvre pour les sauver, sera toujours un crime odieux aux yeux de qui a le sens de la justice la plus élémentaire.

La seconde objection conteste le principe même des solutions mortelles quand ces solutions ne visent aucun bien supérieur : si l'on peut concevoir, en tant de guerre notamment, qu'une mort se justifie pour en éviter plusieurs, il est indubitable en revanche que le meurtre de l'innocent, de la personne fragile, de celle qui est considérée pour x raisons comme un fardeau, de celle qui est jugée non conforme (à quoi diable ?), ... il est indubitable que tous ces meurtres ne visent aucun bien supérieur mais qu'ils sont perpétrés pour assurer le confort de ceux qui restent.

Une municipalité doit pouvoir interdire, sur son territoire, la pratique de l'IVG ou tout autre atteinte à la vie des plus faibles. Elle doit pouvoir également prendre des mesures de salut public visant à aider tous ceux qui sont tentés par des solutions mortelles.



vendredi 3 avril 2015

Production / consommation et nouvelle municipalité


L'Etat français en 2015 épuise les contribuables (cf. http://www.lecri.fr/) et ne parvient pas à équilibrer ses échanges commerciaux avec le reste du monde. Le déséquilibre de sa balance commerciale en sa défaveur atteint parfois des profondeurs inquiétantes. Cette situation de déficit est tout à fait anormale étant donné les ressources considérables dont dispose la France. Elle est certes naturellement déficitaire pour des matières comme l'or noir ou certains minerais mais cela devrait être largement compensé par l'abondance de l'or blanc, de l'or bleu, des terres arables, de la production de biens et de services, ... or ce n'est plus le cas aujourd'hui. Que manque-t-il pour redresser la barre ?

Le projet France2022 prévoit que le calcul des entrées-sorties marchandes ne se fasse plus seulement dans les comptes de la nation mais au niveau de chaque nouvelle municipalité : tout gouvernement municipal suit désormais les productions et les consommations de son territoire, ses importations et ses exportations. Cela n'a rien d'évident et cela paraît même impossible. Aujourd'hui plus qu'hier, il est clair qu'il ne faut pas non plus tendre vers un surcroît de contrôles tatillons, des contrôles à n'en plus finir qui ralentissent ou perturbent l'activité et la vie des corps intermédiaires. Ce qui ne signifie pas non plus qu'il faille renoncer à tout contrôle. Que serait un organisme vivant sans fonctions de contrôle et de régulation ?


Nous avons aujourd'hui un ministre de l'Agriculture et un ministre de l'Industrie. Cette scission des activités productives est justifiée au niveau national par l'ampleur de la tâche de chaque domaine. Elle ne se justifie pas au niveau municipal. Le ministre municipal de la production (des biens et des services) aura une vue complète. Cela est d'autant plus envisageable que les territoires municipaux ont le plus souvent aujourd'hui des spécificités qui les font tendre vers un champ d'activités plutôt que vers un autre. Notons ici que le projet France2022 a pour but de rééquilibrer l'éventail des productions sur chaque territoire municipal, territoire fortement agrandi le plus souvent puisqu'en prévoyant seulement 1000 municipalités pour tout le territoire métropolitain de la France, nous obtenons une moyenne de 550 kilomètres carrés par nouvelle municipalité. Voir à ce propos la taille des communes en France et territoires d'outre mer.



La première responsabilité du ministre municipal des productions est de veiller à ce que la municipalité dont il a la charge parvienne, tous comptes faits, à une position globale d'équilibre et même à une situation excédentaire si cela se justifie. Tout économiste comprendra que cette pétition de principe ne se réduit pas à une résurgence du mercantilisme


Un exemple pour illustrer cela : dans une municipalité dont le territoire subit de grandes variations de fréquentation et d'occupation en raison d'une activité touristique importante mais saisonnière, il va de soi que son territoire peut difficilement, à certaines périodes de l'année, nourrir par ses productions locales tous les personnes présentes simultanément. Il faut néanmoins que les revenus que la municipalité tire de cette activité touristique équilibrent et même dépassent ses dépenses supplémentaires de nourriture, d'entretien du patrimoine et des réseaux de son territoire, ... 


Quand une municipalité a la chance de pouvoir accueillir un grand nombre de touristes tout au long de l'année, seul un motif exceptionnel, motif géographique ou historique par exemple, est recevable pour qu'elle laisse filer les déficits en matière de biens et de services de première nécessité (voire davantage). Sinon, tout doit être mis en oeuvre pour que la municipalité soit en mesure de répondre par elle-même, soit directement par ses productions, soit indirectement par ses revenus, aux consommations qu'elle enregistre sur son territoire. Lorsque cette couverture locale des besoins n'est vraiment pas possible, la province d'appartenance de la municipalité peut être sollicitée par la municipalité. La province intervient alors en veillant à le faire au plus près du territoire concerné.

jeudi 2 avril 2015

Accueil des étrangers dans chaque municipalité



« J'étais un étranger et vous m'avez accueilli. » 

(Mt 25, 31-46)






En préambule : que serait la planète des mathématiques, en France et dans le monde entier, si dans les années quarante des âmes de bonne volonté n'avait pas su accueillir, défendre, protéger et même sortir des griffes de l'abomination Alexandre Grothendieck ?



Voir aussi, entre autres :

http://www.eglise-pour-notre-temps.net/litterature/litterature-088.html

http://www.lejourduseigneur.com/Web-TV/Thematiques/Questions-sur-Dieu/Dieu-et-les-autres/La-charite-et-l-accueil/Accueillir-l-etranger-selon-la-Bible


La tribune que vous lirez illustre de quelle manière le projet France 2022 prévoit de donner davantage de responsabilités aux nouvelles municipalités pour que l'évolution de la société française s'ajuste au mieux aux réalités du terrain tout en respectant la dignité des personnes.




Ce qui suit ne prétend pas résoudre les problèmes actuels de façon magique, péremptoire ou inquiétante. Cette tribune n'est qu'une ébauche pour éclairer l'esprit de la réforme. Le lecteur est donc prié en l'état actuel de cette tribune de s'attacher non pas aux modalités pratiques mais aux principes défendus. Toute contribution susceptible d'améliorer les principes ou les modalités sera bienvenue. Toute question ou toute inquiétude sera reçue avec la plus grande attention.






Le projet France2022 prévoit la création d’un statut de citoyen municipal donnant la possibilité de participer aux échéances électorales municipales. La participation aux échéances électorales provinciales (anciennement régionales), nationales et européennes demeurent en l’état actuel.



Le projet France 2022 prévoit aussi la création d’un service des étrangers dans chaque municipalité, service où s’effectuent toutes les démarches d’autorisation de séjour, de délivrance et de suivi des permis.




Les municipalités définissent de manière autonome les limites d’accueil selon les réglementations de leur province d’appartenance et selon les lois françaises.



En faisant de la municipalité le seul lieu d’accueil et d’intégration des étrangers, le projet vise à donner à chaque municipalité la responsabilité de bien s’organiser pour cette mission, notamment pour ajuster sa politique de développement et ses possibilités d’accueil, non seulement en terme d'emplois et de logements mais aussi de services, d'équipements, de budgets ...



Cet ajustement tient compte de l’avis des citoyens municipaux de la manière suivante : à toute nouvelle élection municipale, chaque liste candidate doit informer les électeurs de façon précise sur la politique d’accueil et d’intégration des étrangers qui sera mise en œuvre tout au long de son mandat. Il est important de noter que la précision en l’occurrence exclut toute considération de race, de religion, d’appartenance ethnique ou de provenance géographique. En revanche, elle indique le nombre d’hommes, de femmes et d’enfants prévus, les catégories de métier, …



L’équipe municipale publie un bilan annuel permettant de suivre son action. Ce bilan ne se réduit pas à des tableaux de nombres mais indique les mesures prises pour faciliter l’accueil et l’intégration des personnes venant de l’étranger : réhabilitation et construction de logements, cours de langue et de culture françaises, développement des emplois, mesures de vérification, … 


L’esprit de cette réforme se résume ainsi :


- la France fait honneur à sa tradition 
  d’accueil et d’hospitalité ;

- les étrangers sont reçus avec égards et respect mais avec 
   prudence et intelligence ;

- les citoyens d’une municipalité sont informés 
   et restent maîtres de la situation.



Dans cet esprit, le bilan annuel publie le résultat d’enquêtes auprès des personnes accueillies et des citoyens municipaux.


mercredi 1 avril 2015

Pour une école renouvelée en France



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Commençons par un point essentiel : l'effort à déployer pour que chaque citoyen en France devienne au moins bilingue (voire polyglotte pour ceux qui le voudraient et le pourraient). Situation de fait qui prévalait au temps, pas si lointain, où la plupart des Français habitaient en zone rurale, parlant un patois à la maison et, plus ou moins, le français en dehors ; où nombre d'enfants des campagnes apprenaient le français à l'école devenant ainsi bilingues. 

Cette situation de bilinguisme de fait donnait une très grande force à tous ces citoyens qui pouvaient non seulement puiser, dans l'enracinement initial, une solidité et une stabilité précieuses pour s'aventurer ailleurs mais encore s'ouvrir à une altérité, large et de bon aloi, cette expérience indispensable qui sort l'être de schémas trop convenus et terriblement étriqués. Au fond, cette situation permettait de vivre les deux grands pôles mis en lumière par la théorie de l'attachement : sécurité des attaches originelles et goût de l'exploration dans la confiance. 

A l'heure où la France tend à devenir un village parmi d'autres à l'échelle planétaire, il est urgent de retrouver la puissance du bilinguisme précoce qui installe l'être humain, dès sa petite enfance, dans une dynamique stimulante et ... rassurante par le jeu d'une double appartenance le préparant à vivre bien d'autres appartenances, non pas dans le morcellement de soi mais dans un tout unifié où se mêlent racines familiales, locales et géographiques, religieuses, sociales, culturelles, patriotiques, ... ; bilinguisme susceptible aussi de rapprocher les citoyens autochtones de tous ceux qui, souvent par la force des choses, ont dû quitter leur pays d'origine et doivent vivre ce bilinguisme dans des conditions plus délicates, périlleuses, instables ... : déracinement, difficultés d'adaptation, obstacles dressés sur le chemin par le rejet, la suspicion, la peur, la pauvreté, ... Bilinguisme, enfin, qui développe une qualité essentielle : le respect d'autrui puisque chacun apprend ainsi à ouvrir en soi un espace pour un autre que soi-même. 

La nouvelle organisation territoriale du pays en cinq grandes provinces seulement (carte sur la page d'accueil du projet France2022) a pour but, entre autres, de faciliter cet effort. 


Cette orientation bilingue a pour objectif de :

- renforcer les liens de la France 
  avec ses voisins européens immédiats ;

- favoriser la tradition, déjà bien ancrée chez nous, de traduire une multitude d'ouvrages en provenance de l'étranger. Cette tradition donne au français d'être une langue de référence dans le monde, une langue dans laquelle la quantité de connaissances disponibles est colossale ;

- réciproquement, renforcer la traduction des oeuvres en français pour qu'elles soient diffusées dans le plus grand nombre de langues possibles, contribuant ainsi au rayonnement de notre pays ;

- permettre l'expatriation de nombreux Français à l'étranger que ce soit pour des engagements bénévoles ou pour des missions professionnelles ; ...

- donner à chaque citoyen le goût de l'attachement et de l'exploration tout en lui permettant d'expérimenter la joie de communiquer selon divers modes que suscite d'emblée l'appartenance à deux mondes linguistiques ;

- offrir à chaque citoyen la puissance cognitive et la souplesse de pensée qui résultent de la faculté d'envisager le monde, les situations, les problèmes, les relations, ... d'un double point de vue linguistique avant de le faire d'un triple, quadruple, ... point de vue ;

- préparer chacun aux grands défis linguistiques de tous les temps et plus encore du monde à venir : être capable de recevoir et d'émettre des informations présentées selon les divers modes d'expression que sont le langages naturels, les langages techniques, le langage sonore et musical, le langage pictural et graphique, les langages gestuels et ceux du corps ... ;

- développer en chacun le goût de l'altérité sans craindre de dissoudre sa propre identité en mouvement dans un courant qui lui échapperait totalement.


Apprendre, comme aujourd'hui au collège, deux langues vivantes et une langue dite (sottement) "morte" sans parvenir à maîtriser parfaitement l'une d'elles est une perte de temps et d'énergie. Qui plus est lorsque cet effort s'appuie sur une maîtrise très insuffisante du français. A cet égard, la remise en cause récente (mais heureusement provisoire) de l'enseignement du latin et du grec va encore détériorer une situation peu glorieuse. 

Situation aggravée par l'usage abusif du détournement de sens qu'opère une société perdue : pour tenter d'éluder ses propres responsabilités, elle finit par se mentir à elle-même, à se réjouir de fausses avancées pour ne pas avoir à déplorer des reculs qui mettent en péril son avenir. Ainsi en va-t-il d'une espérance de vie chantée sur tous les tons pour glorifier une médecine soit disant prodigieuse (elle l'est en effet sur certains plans) et passer sous silence le massacre des innocents auquel elle contribue avec la "bénédiction" d'un Etat démissionnaire. De sorte que ce qui paraît être un progrès : vivre de plus en plus vieux et en bonne santé (?) cache en réalité l'élimination d'un quart d'une génération montante de sorte, qu'au final, nous obtenons une espérance de vie à la naissance complètement surévaluée puisqu'elle ne tient aucun compte de l'assassinat des enfants en gestation. Une société qui aurait le courage de ne pas se mentir à elle-même établirait une "espérance de vie à la conception" qui, malgré son imprécision, traduirait plus justement l'état d'une société en pleine déroute où l'espérance de vie à la conception n'a cessé de régresser ou de stagner depuis 1975. Dans cet exemple, le mot "espérance" n'a plus qu'un rapport lointain avec son sens le plus profond, cette vertu théologale que célébrait si justement Charles Péguy. Terme mathématique désignant une moyenne pondérée, il met en chiffre un enregistrement du passé et donne seulement une indication probabiliste. Calculée sans tenir compte de l'intégralité des décès, l'espérance tient les hommes et les femmes de ce temps dans l'illusion d'une prospérité et d'un progrès qui se paient d'une régression infâme, si peu avouable qu'il n'est pas rare de rencontrer des femmes soulagées de pouvoir dire qu'elles n'ont jamais avorté ...

Rester en deçà de la maîtrise bilingue d'une langue vivante, c'est ne pas atteindre le seuil qui permet ensuite de se lancer avec profit dans l'étude d'une nouvelle langue, seuil où l'on est devenu capable de nager par ses propres moyens et donc de traverser n'importe quelle piscine ou mer, n'importe quel lac ou océan, sans se croire obligé d'en tenir un bord ou de ne pas s'éloigner du rivage.

Au lieu d'axer l'apprentissage de la première langue vivante sur l'anglais et d'abonder ainsi dans le sens de la domination mondiale et même européenne de cette langue - l'examen de ce qui se passe (se passait ?) dans l'Union européenne est significatif à ce propos : désormais, certains textes émis par les instances européennes ne sont disponibles qu'en anglais alors même que le Royaume Uni s'interroge sur son maintien dans l'Union européenne ... -, il nous paraît préférable d'instaurer des pôles linguistiques forts et logiquement déterminés par les frontières de notre pays. Au nord ouest, l'anglais. Au nord est, l'allemand. Au sud est, l'italien. Au sud ouest, l'espagnol. Au centre, l'une de ces quatre langues. 

Cette option préférentielle pour le maintien de la diversité linguistique devrait trouver un écho favorable chez nos voisins, sans doute préoccupés comme nous par la démission des autorités européennes devant l'hégémonie d'une langue anglaise qui, pour s'adapter à la multiplicité des locuteurs, tend à s'appauvrir des mots les moins usités - et donc de nuances - et à s'enrichir en parallèle de tournures qui font bondir les Britanniques soucieux de préserver la beauté de leur langue.

L'orientation linguistique selon le découpage de la France en cinq provinces est proposée dès les premières années de l'enfance : crèches et garderies bilingues avec du personnel venant du ou des pays limitrophes de chaque nouvelle province française via des accords d'échange de personnels spécialisés dans la prise en charge des enfants en âge pré-scolaire. Cela n'a pas besoin d'être fait à grande échelle dès le début. Il suffit d'avancer progressivement en prenant bien en compte l'avis des parents et des personnes en charge des tout-petits. 

Par la mise en oeuvre du projet France2022, les nouvelles municipalités françaises auront des champs de compétences, des responsabilités et un périmètre géographique plus larges. L'extension de leurs missions, soutenue par le poids des grandes provinces françaises, leur permettront de tisser plus facilement des relations bilatérales avec des municipalités italiennes, espagnoles, britanniques et allemandes, selon leur province d'appartenance. Notons au passage que cette orientation en faveur des territoires va à l'encontre de la tendance désastreuse qui sévit aujourd'hui en France où le pouvoir central infantilise de plus en plus les communes en les dépouillant de moyens et de prérogatives qui leur reviennent de plein droit dans une démocratie bien organisée c'est-à-dire dans laquelle la subsidiarité n'est pas seulement un voeu pieux ou réduite à une peau de chagrin.

Avant la scolarisation des enfants, il ne s'agit pas, évidemment, de se livrer à un forcing mais de donner à chaque enfant la possibilité d'entendre une autre langue (toujours la même, sauf déménagement entraînant un changement de province de résidence) que sa langue maternelle et de l'entendre dans des situations variées.

La scolarité pré-élémentaire est réorganisée pour favoriser le premier apprentissage linguistique, bilingue, précoce et homogène, dans chaque grande province française mais aussi pour éviter ce gâchis que l'on peut observer parmi les enfants à qui l'on apprend à lire leur langue maternelle trop tôt, trop vite et selon un modèle d'apprentissage qui perturbe gravement leur fonctionnement cognitif.

[Le projet France 2022 n'ignore pas que des apprentissages précoces de la lecture ont été mis en oeuvre avec succès. Voir notamment les travaux de Rachel COHEN. Cette façon de faire devrait être l'objet d'une attention particulière pour éviter de passer à côté de possibilités qui ne paraissent pas intéressantes à ceux qui pensent davantage en termes de stades de développement. Ce qui a cours en 2015 à l'école maternelle française n'est pas ce qu'on pourrait qualifier d'apprentissage précoce de la lecture puisqu'on y insiste sur le prérequis du langage oral pour l'accès au langage écrit, ce que nuance la méthode consistant à proposer un apprentissage de la lecture au plus tôt en se fondant sur la possibilité de susciter la précocité et non pas seulement de la constater chez certains enfants. Dans cette façon de voir la précocité, on s'appuie davantage sur le parallélisme des apprentissages que sur leur succession.]

Si quelques-uns sont prêts pour apprendre à lire dès l'âge de quatre ans ou même avant, d'autres ne le sont (ou ne le seraient ? ) pas encore à six ans. *

[La question reste posée de savoir s'il serait possible et souhaitable de faire en sorte que tous soient préparés à pouvoir apprendre à lire avant quatre ans et si oui, comment il conviendrait de les préparer et ensuite de leur apprendre à lire sans provoquer de retard important dans d'autres domaines tel que le développement psycho-moteur]. 

Plutôt que de se caler sur les enfants les plus précoces de fait, l'école aurait intérêt à étaler l'apprentissage de la lecture : un enfant dont le cerveau est prêt apprend facilement à bien lire avec n'importe quel répétiteur attentif et muni d'une méthode allant des éléments les plus simples aux éléments les plus complexes. En revanche, un enfant qui n'est pas prêt et que l'on plonge trop tôt dans la lecture prend de mauvaises habitudes et ce d'autant plus que la méthode le noie d'emblée dans une trop grande complexité. 

Sans vouloir être provocant, le projet de refonte peut même aller jusqu'à défendre l'idée d'un congé parental pour tout parent s'engageant à faire répéter plusieurs enfants au moment où ils apprendront à lire. Proposition de congé parental étayée en 2017 par l'un des éléments clefs du projet France2022 : la création d'une monnaie de service

Il est également possible de s'appuyer sur l'expérience de Céline Alvarez et de tous les maîtres qui ont pris en charge des classes (Montessori en particulier) où des enfants de différents âges apprennent les uns des autres. Occasion de souligner l'importance d'un chantier vital pour la France : redonner ses lettres de noblesse à l'enseignement mutuel, injustement déconsidéré et marginalisé au profit de l'enseignement simultané

A différentes étapes clefs de l'éducation des enfants (lecture, préparation de l'entrée précoce dans la vie active, orientation, éducation sexuelle, ...), retrouvons l'équilibre : les parents, premiers éducateurs des enfants ont à prendre part aussi aux tâches d'instruction, de formation et d'information de leurs enfants pour une forme d'apprentissage essentiel : l'enseignement individuel. Ils en sont capables. L'argument consistant à soutenir qu'il faut former les parents pour chaque mission à assumer envers leurs enfants, s'il est tout à fait valable pour des missions complexes, n'a pas à devenir l'alibi commode pour retirer aux parents toute responsabilité, toute joie et tout bonheur dans l'exercice de l'un de leur plus noble devoir. Rétablir enfin ce qui s'est pratiqué avec succès dans les familles à propos de la lecture autrefois n'est pas un objectif négligeable. Nous avons là un exemple où la tradition vaut la peine d'être redécouverte tout en adaptant ses pratiques au contexte actuel.

Réorganisation prévue pour l'enseignement simultané : le programme de l'école maternelle est désormais dispensé par semestre et non par année de telle manière que l'écart d'âge entre deux élèves d'une même section ne soit plus de 12 mois mais de 6 mois maximum. 

Un élève peut être accueilli (en cours d'année scolaire) dès qu'il a atteint l'âge de 3 ans. L'école maternelle et non plus l'école élémentaire (ré)intègre l'année de Cours Préparatoire (CP). Durant cette dernière et quatrième année du jardin d'enfants, les élèves n'apprennent que le déchiffrage. Ils déchiffrent le code écrit au moyen de méthodes insistant sur la répétition et fondées sur une grande variété d'entrées sensorielles. (Cf. par exemple la méthode Borel-Maisonny et les travaux de Ghislaine Wettstein-Badour). Le but à atteindre : que les éléments syllabiques, isolés ou dans le contexte d'un mot, soient parfaitement maîtrisés à la fin du CP. L'accent est mis sur l'articulation, le rythme, le souffle, ... ; sur la mémorisation de textes et de chansons mais aussi de gestes et de rythmes, .... 

Un enfant qui a appris a respirer dans la diction d'un texte (de mémoire) comprend beaucoup mieux la ponctuation des textes et se trouve armé pour une lecture intelligente des significations véhiculés par l'écrit. A ce stade, il convient d'utiliser largement les découvertes du docteur Alfred Tomatis (effet du même nom, conduction osseuse, théorie complète de la transmission des sons à l'intérieur de l'oreille, précession, oreille droite directrice, boucle audio-vocale, ...). 

Notons au passage que la façon dont ce grand savant a été traité par ses pairs (radiation de l'Ordre des médecins en 1977) n'est pas digne d'une institution qui, faute de courage, a laissé par la suite le monde médical complètement désemparé sous les coups des adversaires déclarés de la vie humaine. Cet Ordre a bien besoin de remise en ordre ... car tandis qu'il s'en prenait à un médecin imparfait et faillible, comme tout homme, mais profondément et même viscéralement attaché à la rémission de ses patients (ils sont innombrables et, parfois très célèbres, à pouvoir témoigner en sa faveur pour susciter une grande réhabilitation de la mémoire de ce médecin de premier ordre qui honore la France et les professions médicales), l'Ordre laissait de nombreux médecins former la caste d'une nouvelle sorte de bourreaux : des fossoyeurs d'innocents dans le sein de tant de femmes qui, faute d'un soutien matériel et spirituel adéquat, sont devenues les victimes indirectes d'un génocide sans précédent dans toute l'histoire des hommes. L'ironie de cette pitoyable parenthèse (il faudrait dire : "plaie") encore ouverte dans l'histoire pourtant glorieuse de la médecine française est qu'au moment où l'Ordre des médecins condamnait Tomatis pour des broutilles, il abandonnait des millions d'enfants à naître pour les envoyer à l'échafaud tandis qu'Alfred Tomatis se passionnait depuis longtemps pour les mystères de la vie foetale et qu'il a mis au jour des données capitales pour comprendre ce qui se joue à l'abri d'une femme enceinte. Il suffirait aujourd'hui que quelques-uns des plus célèbres patients du docteur Tomatis (*) osent se lever, entraînent la cohorte de tous ceux qui ont repris goût à la vie grâce à lui et défendent sa mémoire pour que l'ignominie française prenne un sérieux coup dans l'aile et pour que l'on voie beaucoup de médecins comprendre que le serment d'Hippocrate ne vaut pas seulement pour ceux qui ont vu le jour mais aussi pour tous ceux qui attendent de naître, de grandir, d'aller à l'école ... certes, pas dans un monde indemne de critiques et de turpitudes, mais au sein d'un univers à conquérir, à façonner, à comprendre, à partager et à aimer de toutes ses forces parce qu'il abrite une multitude d'êtres humains qui sont autant de frères à rencontrer, recevoir, accueillir, respecter, servir, encourager, nourrir et consoler.

(*) dont Gérard Depardieu qui témoigne du travail accompli avec Tomatis, dans un premier temps pour remédier à une hyperacousie puis, dans un second temps, à propos de l'anglais (vidéo). 

Il s'agit, entre autres, de ne pas plonger les enfants dans le texte écrit sans s'être d'abord assuré qu'ils possèdent un fond mnésique assez riche, que ce soit en terme de sons, d'intonations, de vocabulaire, d'histoire, de variété de situations et de sentiments, d'émotions, de gestes, ... C'est au cours de cette année de CP que l'on aura intérêt pour atteindre une plus grande efficacité à proposer des exercices différents aux garçons et aux filles, non seulement en les séparant de temps en temps mais encore en les habituant à des exercices avec répons, en choeur mixte et avec soliste(s).

L'apprentissage de l'écriture à ce stade suit pas à pas celui de la lecture et l'enfant y développe surtout la formation rigoureuse et fluide des signes, lettre par lettre et syllabe par syllabe (voir à ce propos la méthode Cuissart). Ce travail d'entraînement ne s'effectue que dans la langue maternelle. L'acquisition des techniques graphiques spécifiques au tracé des lettres insiste à ce stade sur les possibilités d'agrandissement et de réduction (trop souvent négligées par un apprentissage hâtif) pour que l'enfant comprenne que la taille de son écriture est  susceptible de varier. Alors que la formation rigoureuse des lettres lui impose une discipline stricte, il comprend simultanément que subsiste des degrés de liberté (qui se manifesteront plus tard dans la variété saisissante des écritures adultes. Voir à ce sujet les différents paramètres utilisés dans les analyses graphologiques : la direction, le rythme, le souffle, la marge droite, la marge gauche, les dimensions, la pression, les formes).

L'apprentissage intensif de la première langue vivante ne fait jamais appel à ce stade au langage écrit de sorte que cet autre travail linguistique prolonge les modalités audio-vocales si importantes dans la petite enfance. Ce travail linguistique dans un champ différent de la langue maternelle devient comme tout enseignement bien conçu l'occasion de revisiter, à frais nouveaux, des antérieurs ou antécédents, par exemple les questions si importantes de sujet, acteur de l'action ; de successions d'événements ; de temps ; d'espace ; de perception des fréquences vocales ; de vocabulaire, de syntaxe et de sémantique ... et de le faire sur un mode plus ludique, moins "sérieux" et néanmoins d'une grande efficacité ... et encore de le réaliser en usant de comparaisons entre les deux langues. Il s'agit là aussi d'appliquer un principe majeur de l'éducation et de toute formation bien conduite : permettre à l'apprenant de redécouvrir et de développer ses qualités d'enfance, de devenir de plus en plus semblable à ces petits que le Christ offre comme modèle de sainteté. En l'occurrence, demeure dans l'esprit d'enfance celui qui sait rester disciple toute sa vie et ne considère jamais qu'il serait parvenu à des degrés de connaissance qui l'affranchiraient de continuer à s'instruire ou lui permettraient de s'enorgueillir de ce qu'il sait déjà (réentendre à ce sujet l'admirable et rare "chanson" enregistrée par Jean Gabin : Maintenant Je Sais qui parle surtout et se risque à peine à chanter ... et pourtant d'une façon éminemment touchante).

Reste aussi à prendre en compte la question des langues pratiquées à la maison dans les familles dont le français n'est pas la langue d'usage. Le projet France2022 de refondation ne prévoit pas une prise en charge directe de ces situation à l'école mais insiste sur le grand intérêt de faciliter le maintien d'une pratique linguistique qui représente à la fois une chance et un supplément d'exigence pour l'enfant. Chaque nouvelle municipalité dispose, selon le peuplement de son territoire, de la faculté d'organiser l'enseignement suivi d'autres langues vivantes. Le développement, dans chaque municipalité, d'une académie linguistique où interviennent de bons locuteurs natifs est un moyen d'atteindre non seulement ce but mais aussi de favoriser l'intégration réussie au sein de la nation française de personnes soucieuses de garder vivant un patrimoine qui constitue une part de leur identité. Une telle architecture linguistique donne aussi la faculté aux langues pratiquées depuis des siècles en France, comme le basque, le béarnais, le corse et le breton par exemple, de déployer leur vitalité.

Même un enfant qui se révèle précoce pour la lecture ne perd pas son temps quand il apprend à écrire de mieux en mieux. L'apprentissage de l'écriture à ce stade s'accompagne aussi de l'acquisition de gestes très variés : calligraphie, enluminure, écriture et peinture d'idéogrammes, écriture de notes de musique, modelage, sculpture, bricolage, ... C'est le moment de montrer aux enfants que notre système d'écriture alphabétique est un système de codes parmi d'autres. L'enseignement de l'histoire des hommes (au sens large : pas seulement politique) commence naturellement avec l'apprentissage de l'écriture.

Chaque activité qui réclame une séquence de gestes et de tâches peut être présentée avec des modes d'emploi variés faisant notamment appel à un langage non verbal et/ou à un discours en langue maternelle. Le CP redeviendra ainsi un véritable cours préparatoire où sont "installées" toutes les bases cognitives qui vont rendre confortable l'apprentissage de la lecture de textes en CE1. Dès le CP, les enfants apprendront par coeur des textes courts (dont une partie commune à toutes les écoles, au moins par grande province) qui serviront de support de lecture l'année suivante. Le respect de cette connexion donne aux élèves ce fond mnésique qui facilite beaucoup le déchiffrage.

Point capital : l'apprentissage de l'écrit alphabétique n'est plus anticipé comme cela se fait aujourd'hui dès la petite section par des approches inadaptées voire nuisibles pour certains enfants. L'approche répandue aujourd'hui consiste à centrer l'enfant sur la reconnaissance de son prénom. Certains pédagogues ne comprennent pas le tort que subit ainsi l'enfant. Ce n'est pas le lieu ici de développer les arguments à l'appui de la thèse qui prévaut désormais parmi les chercheurs les plus avancés dans ce domaine : apprendre à lire par reconnaissance globale gêne considérablement les enfants en les habituant à des mouvements d'yeux et à des gestes mentaux qui ne conviennent pas pour le déchiffrage performant d'une séquence ordonnée de lettres, de mots et de phrases (Cf. les travaux de Stanislas Dehaene). Dans le même ordre d'idée, les enfants ne doivent pas être placés trop tôt en situation de former les lettres à leur guise : c'est le moyen infaillible d'installer de mauvaises habitudes que l'on aura ensuite beaucoup de mal à corriger. Il suffit d'examiner les écrits que l'on obtient aujourd'hui au collège pour constater les dégâts générés par le laisser-faire trop précoce dans les classes antérieures (en maternelle) ... pour remarquer aussi qu'une écriture massacrée ne résulte pas nécessairement d'un défaut d'attention des enseignants du primaire : certains enfants pris par l'orgueil de la réussite, la prétention de celui qui pense s'être fait tout seul ou encore la vanité de son style original, ne sont pas prêts à écouter et à mettre en pratique les conseils qui leur sont donnés pour améliorer leurs gestes graphiques et diminuer ainsi la fatigue qui résulte d'une gestuelle maladroite, fatigue qui perturbera ensuite gravement la compréhension des cours au collège : l'enfant et l'adolescent qui gaspille une énergie folle dans l'écriture ne dispose plus de ressources mentales suffisantes pour faire l'effort simultané d'écrire et de comprendre. Il sera alors tenté de bâcler ou de s'appliquer outre mesure et, au bout du compte, démissionnera en se disant "nul" à un âge où il faudrait, au contraire, qu'il ait davantage conscience de ses propres forces et qu'il développe une confiance quelque peu impertinente que les années lui apprendront ensuite à ... raboter !

Précisons que le projet de refonte de l'école ne s'appuie pas principalement sur la contestation de ce qui est en vigueur en 2015 mais qu'il vise une fondation plus solide. "Hâte-toi lentement" est le principe directeur de la mise en train de tout ce qui gravite autour de l'écrit. Du CP jusqu'au CM1, la rapidité d'exécution devra toujours être subordonnée à la qualité du rendu : si tu lis vite et que l'on comprend mal ce que tu dis, ralentis. Si tu écris vite et que l'on peine à te lire, va moins vite ... Cette maîtrise qui ne va pas de soi à un âge où l'on voudrait foncer pour devenir grand sans attendre, où l'on aimerait aussi se distinguer des autres, est allégée et comme compensée, par tous les travaux où l'on donne la possibilité aux enfants d'exprimer leur spontanéité, leur vivacité et leur célérité, dans des activités où d'autres qualités comme le premier jet, l'imagination, l'originalité, la rapidité, la hardiesse ... ont une part non négligeable.

La refondation de l'école met en avant la nécessité absolue de sortir des sentiers actuels, ces voies où l'on travaille beaucoup par accumulation et empilement sur des bases fragiles qui plus est ; d'abandonner ces méthodes qui mettent la charrue avant les boeufs en réclamant des élèves débutants des performances de lecteurs rapides. Une telle façon de procéder, qui privilégie la rapidité silencieuse à l'élocution lente et sonore, laisse au bord du chemin l'enfant qui n'a pas assimilé ce qui précède dans le cours d'une progression. Loin de favoriser la réduction des inégalités, cette façon de procéder creuse le fossé entre les enfants les plus précoces et ceux qui peinent.

On dit à qui veut l'entendre que l'école maternelle française est l'une des plus performantes au monde et que les choses se gâtent ensuite. Voilà une rengaine bien curieuse et inexacte. Si l'école maternelle française était si extraordinaire, le taux d'échec (des garçons surtout), dès la fin du CP et ensuite, ne serait pas si important. A l'école maternelle, le meilleur côtoie le pire. Le meilleur : ce souci intelligent de développer patiemment et avec beaucoup d'adresse la psychomotricité des enfants. Oui, dans ce domaine, l'école française marche bien. Cette attention aux règles de vie, à l'ordre, à la participation de chaque enfant à des services, la place du jeu, l'organisation équilibrée de la journée ... tout cela est digne d'éloges et beaucoup de parents sont d'ailleurs admiratifs du travail accompli. Le pire : cette obsession de l'acquisition précoce de la maîtrise de l'écrit alphabétique par des voies inappropriées. Ici nous ne cherchons pas, évidemment, à exagérer les défauts de la situation actuelle. Nous cherchons seulement à éveiller les consciences sur les dangers de cette focalisation excessive : elle blesse de nombreux enfants en profondeur et perturbe gravement leur développement. Cela revient à demander au bambou chinois de pousser avant d'avoir pris racine dans le sol.

Donnons le temps à nos enfants de prendre racine. Ne leur demandons pas davantage de développer des feuilles sur certaines branches au détriment des autres. Que peut produire un apprentissage trop précoce et inadéquat des codes de l'univers alphabétique ? Il produit la mise en sommeil et même pour certains l'extinction des aptitudes graphiques, le ralentissement du développement des aptitudes manuelles, le non perfectionnement des aptitudes sensorielles et corporelles, la fermeture émotionnelle, un rétrécissement de la sensibilité, la perte du sens de l'observation, le désintérêt ou un goût immodéré pour l'écrit, la compensation d'un malaise par excès d'activités distrayantes ne demandant pas d'effort, l'instabilité cognitive ... Une vraie calamité.

Juger que cela est négligeable ne résiste pas à l'argument essentiel : cette précocité mal fondée place de nombreux enfants, et principalement les garçons, en situation d'échec manifeste ou latent. Certains élèves sont nettement largués, d'autres deviennent excessivement lents à un âge où la vivacité et la spontanéité devraient prédominer. D'autres n'auront jamais plaisir à lire. D'autres seront passés à côté d'un autre talent pourtant nettement visible ou même décelable dès leur plus jeune âge. Beaucoup seront handicapés dans tous les apprentissages qui nécessitent de mémoriser une leçon écrite, de bien lire un énoncé, de comprendre finement un texte, ... et même de copier simplement un document écrit.

Au lieu de vouloir avancer à toute force, quoiqu'il advienne, sur un chemin balisé et identique pour tous, nous devrions être beaucoup plus attentifs aux potentialités foisonnantes et divergentes de l'enfance. Apprendre à lire tôt de manière inappropriée, c'est décider de tailler un arbre qui n'a pas encore développé sa structure propre. C'est également décider que la maîtrise de l'écrit alphabétique est si impérative qu'elle devrait prendre le pas sur tout le reste. Qu'elle soit essentielle, oui. Qu'il faille trop vite et mal l'imposer, non. Faut-il rappeler que la maîtrise de l'écrit ne doit pas être attendue avant la fin de l'adolescence et que même à l'issue de cet âge de la vie, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour être capable de manier sa langue maternelle avec dextérité, clarté et justesse ? Faut-il encore souligner qu'en faisant de l'écrit un passage obligé pour les apprentissages futurs, on institue une forte inégalité entre ceux qui auront franchi le cap et ceux qui vont commencer à ramer péniblement dès le CE1 où l'on a pris l'habitude récente d'avancer trop rapidement comme si tous étaient déjà à l'aise avec l'écrit ? Jusqu'à la fin du CM1, toutes les connaissances devraient être distillées pour que leur présentation écrite (alphabétique) soit (presque excessivement) succinctes. La faculté que nous avons aujourd'hui de photocopier est mal employée quand elle sert à fournir aux jeunes enfants des textes longs qui dépassent largement les capacités d'attention, de compréhension et de mémorisation de plusieurs enfants.

Avant l'entrée au petit collège (CM2 désormais comme indiqué ci-après), nos élèves ont besoin d'être sensibilisés aux parfums des choses, à la subtilité et à la variété des phénomènes, à l'intérêt d'ouvrir les yeux, d'écouter, de toucher, de sentir, de goûter et pour que cela ait un sens, ils ont à découvrir les grandes architectures, les structures fondamentales. Nous devons leur enseigner une grammaire des formes solide où la place du "je", du "nous", le rôle de l'action et ses finalités leur apparaissent clairement tandis que leur imagination puissante à cet âge alimente ce brasier naissant.

Il faudrait en dire davantage. Arrêtons-nous là pour le moment afin d'avancer : que faire après le CP ? Dans les grandes lignes : raccourcir l'élémentaire d'une année pour intégrer le CM2 au (petit) collège. Du CE1 au CM1, faire travailler les enfants, non par classe d'âge mais par niveau d'aptitude : un enfant sachant lire avec aisance, non seulement en silence mais de vive voix, en comprenant ce qu'il lit n'a pas à suivre le même rythme qu'un enfant qui balbutie ou ne saisit pas le sens de ce qu'il lit. Un enfant qui manifeste des dons précoces pour les mathématiques avancera de telle sorte qu'il puisse explorer un champ plus vaste et plus complexe que celui qui peine dans ce domaine. Le plus important : que le programme du CE1 au CM1 ne soit cumulatif que sur un nombre restreint de points incontournables et que tout le reste du programme favorise une exploration large mais solide dans chaque discipline. Le programme actuel du CP à la sixième, se répète à l'excès comme si l'on redoutait que les enfants oublient les choses d'une année sur l'autre : il suffit d'examiner ce qui se passe en mathématiques pour constater l'inadaptation des notions enseignées aux capacités des enfants ainsi que l'extrême pauvreté du fond transmis. Rien sur la logique, rien sur la théorie des ensembles, rien sur les graphes, rien sur la comparaison des objets, rien sur les relations entre les objets (en dehors de la pauvre inégalité des nombres), rien sur l'histoire des mathématiques, rien sur le fini et l'infini, rien sur le discret et le continu ... En revanche, beaucoup de répétitions sur la symétrie axiale, beaucoup de lenteurs et des modes d'exposé perturbants pour les opérations arithmétiques, une utilisation trop précoce des signes d'inégalité, une présentation inadéquate des fractions, une trop grande hâte dans l'introduction des décimaux, l'oubli des puissances et des racines d'un nombre (tout à fait compréhensibles et manipulables dès le plus jeune âge) ...

Du CE1 au CM1, le projet de refondation du programme des trois années élémentaires pour l'enseignement simultané est réparti en six modules indépendants (trois fois deux semestres). Un enfant qui peine dans un module reçoit un soutien mais ne refait pas un module en redoublant. Les six modules de chaque discipline sont conçus pour limiter au maximum les redites et pour éviter l'empilement des notions. Du CP au CM1, l'apprentissage est fortement exploratoire. Il reste cependant centré sur un noyau de connaissances et de savoir-faire dont la maîtrise ne souffre plus l'à-peu-près. Un exemple simple permettra de comprendre comment le programme est organisé : tous les élèves ont à maîtriser les bases du calcul arithmétique à la fin du CM1. Plutôt que d'étudier les opérations les unes après les autres comme cela se pratique encore en 2015, les enfants du CP redécouvriront les quatre opérations déjà abordées concrètement à la fin de la maternelle. Le temps sera venu pour eux d'établir lentement un lien entre l'écriture des opérations et leurs manifestations concrètes. En CE1, ils seront déjà sensibilisés aux problèmes posés par la soustraction et la division (lois de composition non internes dans l'ensemble des entiers naturels à la différence de l'addition et de la multiplication des nombres), problèmes qui ne seront théoriquement résolus qu'en CM2 à l'entrée du petit collège, puis en 6ème et en 5ème (comme à l'heure actuelle). A l'issue, du CM1, tous les élèves auront acquis les bases indispensables pour suivre en CM2 tout en ayant exploré un champ assez large dans chaque discipline pour avoir une idée plus claire de son étendue.

Du CE1 au CM1, l'exploration plutôt que l'empilement est donc à privilégier. Cette exploration partira toujours du concret pour aller vers l'abstrait et le passage par l'écriture ne se fera qu'après de nombreuses manipulations. Ce n'est qu'à partir du CM2 que l'organisation des apprentissages en strates commencera. A la fin du CM1, chaque enfant et ses parents devraient avoir une connaissance plus précise de ses goûts et de ses aptitudes ainsi que des limites qu'il conviendrait d'essayer de repousser en priorité. Ce peut être des limites cognitives mais aussi des freins dus à des dispositions de caractère inappropriées pour l'étude ou encore une santé fragile, un manque d'énergie, un défaut d'intelligence clairement établi (cf. par exemple : la théorie des intelligences multiples) ou parfois un trait de génie si puissant qu'il porte tort à l'ensemble des aptitudes de l'enfant comme ces arbres qui développent une branche maîtresse aux dépens des autres parties de la ramure de l'arbre ... . 

Les limites et les aptitudes sont à déterminer sur des grands axes interdisciplinaires : attention, compréhension, mémorisation, imagination, expression, ... d'une part (cf. à ce propos la théorie de la gestion mentale) ; sociabilité, esprit de coopération, persévérance, ténacité, humilité ... d'autre part. 

Les résultats obtenus par discipline du CP au CM1, quant à eux, ont une incidence sur la première strate du petit collège : un élève très à l'aise commence directement au niveau 2 ou 3. Un élève en difficulté commence au niveau 1. Et cela, discipline par discipline. Un examen ne conditionnant pas l'entrée en petit collège y détermine le niveau de départ.

Pour aller plus loin et sortir du carcan de l'enseignement simultané, voir une présentation de l'expérience menée par Céline Alvarez à Genevilliers qui montre l'intérêt de revoir en profondeur ce qui se passe dès les premières années de maternelle de façon à ne pas envoyer près de 40% des élèves de CM2 sous le joug d'un collège auquel ils ne sont pas préparés.

Avançons encore : pour l'enseignement simultané, le petit collège rassemble désormais les années de CM2, 6ème et 5ème actuelles. Là, les enfants progressent non par classe d'âge mais par niveau d'aptitude, selon les disciplines. Le programme de chaque discipline est réparti en neuf niveaux (trois fois trois trimestres).

Avant de parler des études proprement dites, les trois années de petit collège sont un temps privilégié pour permettre aux enfants et aux parents de tisser de nouveaux liens fondés sur une exploration des métiers, des conditions de la vie professionnelle, ... Au cours de ces trois années, plusieurs périodes sont prévues pour qu'un élève puisse accompagner l'un de ses parents ou un proche de la famille ou encore un autre parent de l'école dans l'exercice de son métier, de voir concrètement ce qui se passe, de participer à sa mesure à des tâches non pénibles, écouter, raconter ce qu'il a vécu. Il n'est pas difficile de constater en 2015 que des enfants ne savent pas dire ce que font leurs parents ... Cette situation que l'on peut expliquer facilement et tant qu'on le voudra est ... absurde. Sortons de l'ignorance, du fossé et de l'indifférence. Notons au passage que pour saisir ce qui est en jeu, il est utile d'avoir connu soi-même ce que peut apporter de telles expériences, soit enfant soit de l'autre "côté" en tant qu'adulte.

Les trois années d'étude du petit collège ont pour but de fortifier les acquis fondamentaux et de donner à chaque enfant l'assise solide qui va lui permettre, dès la classe de quatrième, de développer ses talents spécifiques. A l'issue de la cinquième, la confirmation d'un ou de plusieurs talents, la révélation de nouveaux talents permettent d'envisager l'avenir avec plus de détermination. A la fin du petit collège, chaque élève est capable de tenir une conversation dans la langue vivante enseignée prioritairement dans sa province d'appartenance et il comprend avec autant d'aisance un texte écrit en français et un texte écrit dans cette première langue vivante (pour les familles qui ont à changer de province en cours de scolarité, des enseignements linguistiques de rattrapage sont dispensés). Pourtant, le moment est venu de proposer une pause pour mettre en place une nouvelle approche.

A partir de 12 ans, tout enfant va préparer son entrée dans l'âge adulte. Ce n'est pas en maintenant le rythme d'étude actuel et la dispersion des efforts imposée que l'on y parvient mais en renouant avec ce qui s'est pratiqué dans la douleur autrefois et dont nous sommes heureusement sortis : le travail précoce avec des adultes. Si le lecteur comprenait que le projet France2022 vise à rétablir en France l'exploitation des enfants telle qu'elle se pratique encore dans certaines régions du monde, il n'aurait plus qu'à tourner la page. Il serait dans l'erreur. Il s'agit évidemment de tout autre chose.

Le grand collège réunit les classes de 4ème, 3ème et de seconde actuelles mais profondément remaniées. Durant ces trois années, une année répartie sur toute la période est consacrée à l'apprentissage des bases d'un métier à dominante concrète. Ce métier n'est pas nécessairement en lien avec les projets de l'adolescent au moment de son choix mais il peut l'être. Par exemple, choix de la facture d'instruments pour un élève se destinant à la musique. Le même élève pouvant choisir la boulangerie ou le travail du verre s'il le souhaite. Le choix d'un métier peut évidemment être conditionné par des facteurs objectifs ou des raisons majeures.

Le parcours en grand collège est destiné à vérifier que les prédispositions décelées avant l'âge de 12 ans se confirment ou à constater qu'il convient de voir l'avenir autrement. Cette vérification se fait en délivrant à chaque élève un programme intensif (sans pour autant cavaler) dans les deux disciplines où il a excellé au petit collège. Ce programme intensif mène chaque élève en fin de seconde à un niveau supérieur à celui de fin de première voire de la terminale du lycée en 2015 dans les deux disciplines choisies. Ne sont maintenus pour tous qu'un développement progressif de la maîtrise du français ...

[qui n'est pas un enseignement de la littérature. C'est seulement au lycée qu'un module commun à tous les élèves apportera les bases d'une connaissance éclairée de la littérature française générale. Commencer cela trop tôt produit plus sûrement le dégoût des belles lettres. Au collège, les seuls textes généraux étudiés comme support de l'acquisition de la maîtrise de la langue ont à se focaliser sur l'amitié, le don de soi, les voyages et la connaissance de la nature, la vie et la mort, la philosophie et la spiritualité]

..., un enseignement physique et sportif et un enseignement artistique.

L'enseignement intensif de chaque discipline intègre : l'apprentissage du vocabulaire de la première langue vivante spécifique à cette discipline, l'étude de la littérature propre à la discipline [dans les années de collège, l'étude des lettres doit être centrée sur les intérêts de l'enfant. Il est vain de vouloir l'intéresser à des textes éloignés de ses préoccupations générales (voir ci-dessus) et spécifiques (les disciplines de son choix)], l'enseignement de l'histoire de cette discipline et un approfondissement de son vocabulaire, notamment par l'étude de ses racines grecques, latines, indo-européennes, arabes, ...

Seuls les élèves les plus brillants dans la première langue vivante pratiquée prioritairement dans la province peuvent étudier une seconde langue au grand collège et en faire une spécialité. Les enseignements de spécialité artistique (dessin, peinture, sculpture, danse, musique instrumentale ou vocale, théâtre, ...) ou sportive sont dispensés dans des académies telles qu'on en trouve aujourd'hui pour la musique et la danse (conservatoires) ou le sport (clubs). 

Le projet France2022 prévoit la création d'une académie linguistique pour l'étude des langues vivantes. Chaque municipalité a la charge de développer ou de susciter ses propres académies. Les autres enseignements de spécialité (histoire, littérature, géographie, biologie, physique, mathématique, technologie, langues vivantes en l'absence d'une académie dédiée ...) sont dispensés au collège.

Dès le grand collège (niveau actuel de la quatrième), chaque élève entre dans la vie active. Après une période d'initiation, il est rémunéré comme stagiaire dans le métier qu'il apprend. Par un engagement bénévole à sa mesure, il accomplit en parallèle la première partie d'un service civique qui se poursuivra par période, au cours de sa vie professionnelle et pendant sa retraite.

Voir à ce propos la tribune ajoutée en 2017 : "Création d'une monnaie de service" qui étaye la mise en place d'un service civique.