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mercredi 15 octobre 2014

Lumière sur nos ténèbres


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Difficile de comprendre la politique française sans faire appel aux traditions chrétiennes qui ont fortement imprégné son exercice et le sol où elle se déploie. Ajout du 16 octobre 2015 : Bernard Cazeneuve, Ministre de l'Intérieur le rappelle dans son discours en la cathédrale de Strasbourg le 3 octobre 2015.

Pour justifier l'absence d'un grand parti démocrate chrétien en France, l'explication hâtive s'appuie sur l'argument de la laïcité à la française : ici, séparation nette (mais apparente) du politique et du religieux, inscription du spirituel dans la sphère privée. C'est oublier que l'Evangile s'est répandu sur l'ensemble du territoire et qu'il a déposé, à tous les niveaux de la société, les germes d'une présence diffuse : il suffit alors de prendre le temps de l'analyse pour découvrir ses racines en tous lieux. 

Les ronces du paganisme ou de tout autre envahisseur peuvent empêcher le christianisme de fleurir pleinement et de produire tous ses fruits mais qu'un vent sec se lève et que le soleil brûle ces ronces, nous verrons le moindre feu embraser cette paille et libérer un nouvel espace d'expansion pour l'Evangile. Les ronces ne pourront pas enfermer le parfum de l'Evangile et l'assigner à résidence surveillée : toute contrainte exercée à son endroit lui insuffle un regain de vigueur qui balaie tôt ou tard ses plus féroces contempteurs.

Notre propos ici n'est pas de prévoir ou de prédire les événements qui vont advenir même si cela n'est pas sans intérêt. Ajout du 16 octobre  2015 : voir à ce propos le livre de Jacques Attali chez Fayard : "Peut-on prévoir l'avenir ? Le sien, celui des autres"

Nous chercherons seulement à voir comment l'Evangile éclaire d'un jour lumineux la paralysie du politique en France. Nous découvrirons alors de quelles façons chaque responsable politique et chaque citoyen pourrait, en se nourrissant de l'Evangile, débloquer la situation critique que nous connaissons.

En étant davantage conscient de l'imprégnation évangélique de son environnement, le politique ne perdra plus de temps et d'énergie à diaboliser ses adversaires d'un jour ou de toute une vie : ceux-ci, comme lui-même, ont reçu une part de l'Evangile et bien rares sont les personnes qui n'en ont rien gardé. Que ces autres n'aient pas retenu les mêmes passages que lui ne l'étonnera pas. Quel est celui d'entre nous qui oserait affirmer qu'il a tout assimilé de l'Evangile au point de vivre à tout instant de l'esprit du Christ ?

Allons plus loin : même reçus et assimilés, les enseignements de l'Evangile ne se transforment pas en vertus du jour au lendemain. Nous sommes dépositaires d'un trésor à l'état de semence et il nous faudra beaucoup de patience, d'humilité, ... pour que cette semence parvienne à maturité. D'expérience, toute personne finit par savoir qu'elle est vulnérable : elle demeure un vase fragile au sein duquel les plus belles semences courent toujours un risque. Comment le politique pourrait-il l'ignorer ou échapper à la condition commune ?

Plus grave encore : le plus vertueux n'échappe pas à la tentation de l'orgueil. Eût-il acquis une sagesse admirable et des vertus héroïques, un rien serait encore capable de le transformer en démon. Diaboliser ses adversaires ou un adversaire en particulier n'est-il pas le signe avant coureur que celui qui se livre à ce genre d'exercice a mis le pied sur une pente dangereuse ? Accuser avec insistance tel ou tel défaut chez autrui n'est-il pas l'indice que la personne accusatrice a quelques soucis avec ce qu'elle prétend dénoncer ? En parlant de l'autre, elle livre en filigrane ses bas fonds. En s'attaquant à la personne d'un candidat, elle révèle en creux la misère de son programme et la bassesse de ses ambitions. 

En 2017, nous aurons besoin au contraire d'un projet qui mette l'accent sur la nécessité grandissante de la miséricorde. Un candidat qui ne montrerait pas l'exemple en ce domaine perdrait tout crédit et ferait courir à notre nation le risque d'une propagation de la "dénonce". Si le politique ne sait pas éviter l'infestation puante de la calomnie ou de la médisance, qui le fera ? Les vautours médiatiques ?

Alors que les attaques de charognards sur des vivants et même d'oiseaux citadins sur des êtres humains font la une de l'actualité, les hommes vont-ils aussi participer aux dérèglements ou aux ajustements de la nature ? Quels remèdes à cette dérive batailleuse voire meurtrière ? Est-il donc vrai que le champ politique soit devenu cette arène où même les femmes se prennent pour des taureaux ? Dans un monde où le jeu collectif et la coopération devraient prévaloir, allons-nous laisser toute latitude à quelques individus assoiffés de pouvoir, de revanche et de notoriété ?

Le politique ne peut, aujourd'hui comme hier, se contenter de bribes évangéliques. S'il ne dépasse le vernis biblique qui apporte du brillant au salon ou à la ville, il cédera à la moindre tentation. Il cédera non seulement en privé mais aussi en place publique. Il cédera à l'infâme tentation de discréditer ses rivaux comme ses adversaires. Le triste spectacle que nous ont offert quelques-uns de nos politiques ces temps derniers est-il à même de guérir en profondeur tous ceux qui n'ont pas encore saisi la stérilité d'une attitude accusatrice ? Toute personne de bonne volonté le souhaite et l'espère mais ne saurait se réjouir qu'il faille de telles bassesses pour provoquer un électrochoc salutaire.

En découvrant un salut qui s'adresse à tous et qui dépasse l'existence propre de chacun, aucun politique n'ose encore prétendre qu'il sera en mesure de remédier à tous les maux, qu'il saura établir un paradis sur terre. Il n'imaginera plus que d'autres puissent avoir la prétention inverse : bâtir un enfer, même si les leçons de l'histoire et l'actualité commandent de rester vigilant pour être prêt à dénoncer toute tentative d'instaurer un régime de terreur. Il comprendra qu'il est inutile et nuisible de considérer les autres comme des ennemis ; que la citation : "l'enfer c'est les autres", mal comprise, appartient aux poubelles de l'histoire.

Nul besoin d'être très avancé spirituellement ou psychologiquement pour expérimenter que la tristesse ne résulte pas seulement du regard d'autrui mais aussi de la perception que l'on a de ce regard. Sans un travail long et patient sur notre manière de voir, nous cherchons des coupables en vain, nous condamnons des innocents et nous martyrisons des hommes et des femmes qu'une parole aimante délivrerait de nos soupçons, de nos jugements et de nos égarements.

Pour accéder au pouvoir, on a beaucoup tué : que de complots ; que d'assassinats ! Le venin de la calomnie remplace aujourd'hui le poison d'autrefois. La parole assassine vaut la dague d'antan. 

Citoyens ordinaires, spectateurs lassés ou excités par les joutes politiques, allons-nous laisser une vipère ou un vautour présider aux destinées de notre pays ? Aurions-nous une conception si guerrière du monde qu'il nous paraîtrait préférable d'être conduits par un(e) expert(e) en meurtres propres plutôt que par une personne inoffensive ?

Dans "la paille et la poutre", nous avions rappelé le principe bien connu de l'esprit de la louange : prendre la parole en toutes circonstances pour bénir et remercier, admirer et louer. Ici, nous allons plus loin : comment faire grandir cette force avant même de l'exercer ? Comment orienter l'arc de notre esprit avant de décocher nos flèches ? 

Ce serait une illusion de croire qu'il est possible à l'homme de renoncer sans dommage à ses instincts guerriers. Plutôt que de vouloir le transformer en chiffe molle, prenons la peine de lui donner un espace de combat où son prochain n'est plus un jouet à détruire mais un partenaire de jeux sains et même saints, instructifs et porteurs de progrès authentiques. C'est l'une des ambitions du projet France2022.

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