En guise de prélude pour le lecteur non pressé :
http://www.youtube.com/watch?feature=endscreen&v=EGQlJQ_3-Sg&NR=1
Veille de Noël, dans une boulangerie comme il en existe tant d'autres en France, un couple d'Américains s'apprête à retourner de l'autre côté de l'Atlantique en emportant une baguette parisienne et un pain complet. Il demande qu'ils soient enveloppés de plastique pour tenir le temps du voyage tandis que la boulangère explique que ce sera mieux dans du papier ...
Du bon pain, on en trouve ailleurs dans le monde : en Allemagne, dans un village bavarois, vous aurez la joie d'en découvrir suspendu à la porte de l'appartement que vous louerez pour les vacances ; au Liban ou en Palestine, les marchands ambulants vous régaleront de pain au sésame ... En exil ici ou là, vos compatriotes vous rejoindront en vous apportant fromage, saucisson et vin de France pour couronner le tout parce que, même si le bon pain se trouve ailleurs, il manquera toujours quelque chose du pays.
Douce France que certains déclarent trop arrogante, trop fière de ses conquêtes ou de ses avantages mais voilà, héritier, de longue ou de fraîche date, des Gaulois et de leurs envahisseurs, on comprend vite, à moins d'être obtus, que les produits du terroir devraient figurer sur le drapeau de la nation tant les mentalités en sont imprégnées. Gare alors à celui qui tente d'exporter chez nous ses propres repères. C'est comme s'il commettait un acte sacrilège. Qu'il vende des productions venues d'ailleurs, soit. Cela ne fait qu'enrichir un patrimoine déjà considérable mais s'il s'avise d'opposer ses coutumes culinaires aux nôtres, nous nous sentirons atteints au plus profond de notre identité. Nous l'interprèterons comme volonté délibérée de ne pas faire partie du paysage, de nous déclarer la guerre. L'effronté comprendra bien un jour qu'elle était, pour lui, perdue d'avance.
En choisissant aujourd'hui de nous intéresser au versant sud de la France, à ses atouts les plus manifestes comme les plus secrets, nous aurions tort pourtant de commencer par la gastronomie, aussi noble soit-elle, et par tout ce qui la prépare en amont. En établissant un projet politique vraiment neuf dans ses principes et ses développements, comment ne pas songer d'abord à la situation géographique exceptionnelle du territoire français ? Comment ne pas choisir de s'intéresser d'abord aux pays qui l'entourent et à ces rivages qui l'orientent d'emblée vers l'extérieur ? Non seulement pour justifier un découpage régional nouveau mais plus encore pour que chacun mesure de plus en plus la chance que nous avons d'habiter un sol tellement ouvert sur le monde alentour. Ce ne sont pas les censeurs et juges de bonne conduite, prompts à taxer le Français moyen de racisme, de xénophobie affichée ou latente, qui pourront détruire en nous le formidable appétit pour l'ailleurs qui gît au fond de nos entrailles. Quel peuple aussi fier de ses racines pourrait se prévaloir d'autant d'intérêt pour ce qui l'entoure ? Il suffit certes de franchir la Manche pour découvrir chez nos amis anglais des explorateurs exceptionnels dont nul n'égalera jamais la fantaisie et la curiosité mais de ce côté-ci, c'est un peuple tout entier qui vit au rythme des soubresauts du monde, qui se passionne pour l'ailleurs, qui vibre en écho à tout ce qui bouge et vit sur terre. Au point d'en oublier parfois les soins du ménage, les affaires domestiques, la nécessité première de mettre sa propre maison en bon ordre avant de vouloir enseigner aux autres peuples tout ce qu'il conviendrait de faire pour que le monde aille mieux !
Une citation éclairante dont nous invitons le lecteur amateur d'énigme à retrouver la source - une conversation tout à fait admirable et instructive de notre temps - nous engage à rester modestes et très ouverts sur les qualités de nos voisins : "Vous savez, les Italiens savent vivre et prendre un peu de distance avec les ambitions humaines et leurs pauvres plans ! Tandis que les Français baignent dans le monde des idées, rigides et tranchantes, comme le couperet de la guillotine que nous avons inventée." Le lecteur ayant pris connaissance de l'ensemble du projet France2022 aura noté qu'il évite de multiplier les mesures secondaires pour développer les lignes de force d'une action commune dans laquelle l'Etat tient un rôle éminent mais n'occupe pas toute la scène politique. Cette conception nouvelle du rôle de l'Etat, moins jacobine, implique une redéfinition des fonctions et des pouvoirs du Président de la République française. Celui-ci, bien plus chef de la Nation que chef de l'Etat, libéré d'une partie du gouvernement interne du pays, devra veiller davantage à la qualité des relations de la France avec nos voisins les plus immédiats et avec le reste du monde. Au fil des années, la France, qu'on le veuille ou non, devient un petit pays à l'échelle de la planète. Ce n'est pas en se cramponnant au rôle de donneuse de leçons que la France rayonnera et s'épanouira. Il est temps qu'elle prenne la mesure de sa petitesse et qu'elle travaille avec beaucoup plus d'humilité sans pour autant oublier d'être de plus en plus magnanime.
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